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jeudi 7 avril 2011

Polémique autour du retour de Bertrand Cantat : Pourquoi faire ?

S’il y a un homme, en France, qui ne peut pas faire un pas sans déclencher les foudres d’une partie de l’opinion et attirer toutes les caméras, c’est bien Bertrand Cantat. L’ancien chanteur de Noir Désir et égérie de toute une génération déchaîne les passions. En cause, cette fois, sa venue (dé ?)programmée au festival d’Avignon. Il y a peu, son apparition aux côtés du groupe Eiffel lors d’un concert à Bègles ou encore deux nouvelles chansons offertes en téléchargement avaient déjà défrayé la chronique. Depuis, ses détracteurs se sont sans doute réjouis de la dissolution de Noir Désir.

Toujours est-il qu’aujourd’hui la colère gronde dans le camp de la haine. En tête du cortège, Jean-Louis Trintignant indigné qui annonce qu’il ne se rendra pas à Avignon et qui, surtout, n’hésite pas à convoquer la presse pour le crier haut et fort. Nul besoin de revenir ici sur les raisons de son courroux : le décès tragique de sa fille sous les coups du chanteur il y a déjà 8 ans. Si l’on comprend aisément son désarroi, on peut tout de même se poser la question : est-il indispensable qu’il ne manque pas une occasion de se montrer dans les journaux ? Et la décence dans tout cela ?

Car, honnêtement, le chanteur mérite-t-il d’être systématiquement montré du doigt ? Nulle volonté dans ce propos de m’appuyer sur le talent indéniable de l’artiste pour assurer sa défense. Je m’appuierai simplement sur les faits. Cantat a été reconnu coupable de l’homicide de Marie Trintignant. Point. La justice a tranché et ce dans un pays qui n’est pas forcément reconnu pour ses largesses. Le jugement pouvait d’ailleurs, pour les néophytes, paraître étrange. Soit l’homicide était volontaire et dans ce cas, 20 ans d’emprisonnement n’auraient pas été de trop. Soit celui-ci était accidentel et dans ce cas une peine de 2 ans aurait été plus légitime. Quid donc de cette condamnation à 8 années de prison ? Les facteurs aggravants (prise de drogue notamment) voir « atténuants » (crime passionnel et mœurs de la victime qualifiés de légères par certains défenseurs du chanteur) ? Peu importe en fait tant le déroulement exact de la tragédie de Vilnius restera à jamais un mystère.
 
La justice a donc tranché et Cantat a purgé sa peine. Si bien sûr une réhabilitation apparaît bien improbable (en raison davantage de la médiatisation du chanteur et de sa victime plus que de la nature du crime, malheureusement devrais-je dire), crier au scandale à chacune de ses montées sur scène, fussent-elles timides, me paraît peu approprié. Déjà parce que cela expose Cantat aux projecteurs et lui permet de faire parler de lui et de son art (pour preuve, Noir Désir n’a jamais autant vendu d’albums que depuis la tragédie). Ensuite parce qu’il a payé sa dette à la société et que, comme tout citoyen, il devrait donc pouvoir être réintégré au corps social. Certains objecteront qu’il devrait rester dans l’ombre et ne plus se montrer. Mais s’il ne sait faire que ça ? Imaginez-vous un instant Cantat vous servir un coca au fast-food du coin ? De toute façon, n’a-t-il pas droit également, sans nier l’horreur de ses actes, à la rédemption ? « Ce serait faire injure aux femmes battues » s’escriment les féministes. Il est au contraire un exemple que nul ne peut se permettre, sans conséquence, de porter atteinte à autrui. Surtout, si le droit ne lui est pas offert d’exercer une activité, s’il doit se contenter à jamais d’une vie de reclus, à quoi sert la justice ? Autant rétablir la peine du mort non ?
Dès lors autant laisser Cantat où il est, seul avec ses démons. S’il ne fait pas de bruit, qu’il nous laisse indifférent, il en deviendra insignifiant. Et c’est doute à ce moment là que la famille de Marie Trintignant pourra enfin faire son deuil. Car, soyons sérieux, qui imagine sérieusement que Cantat puisse refaire une carrière de premier ordre ? Certes quelques politiques, Balkany et Mellick en tête, ont prouvé que les habitants de notre pays pouvaient avoir la mémoire courte mais leur passé de justiciable n’était pas aussi lourd. Bertrand Cantat est mort moralement un 1er août 2003. Noir Désir, en tant qu’aventure artistique, restera vivant encore longtemps. Ne donnons pas à son créateur l’occasion de faire parler de lui.

Rédigé par Fred H. 

4 commentaires:

  1. Cet assassin a purgé 4 ans de prison, résultat de la pression de nos "élites" françaises de la "culture".
    Il devrait rester dans l'ombre à jamais.
    En ce qui concerne son "talent indéniable" il s'agit d'une affaire personnelle, et je ne suis pas du tout sûr que cet avis soit unanime.
    Un peu de décence, svp !

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  2. résultat de la pression de nos "élites" françaises de la "culture" ? Sur quelle base pouvez-vous affirmer cela ?

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  3. Bonjour,

    Mais pourquoi, ciel ! Vous lancer dans cette galère en tentant de défendre une personne qui, quel que soit son talent, ne peut être défendue à partir du moment où elle s'offre à la vindicte du public.
    Étonnez-vous ensuite d'être "lynché" par les lecteurs d'AgoraVox.
    Et je fais partie de ceux qui vous ont jeté la pierre car je ne pouvais cautionner des propos, concernant le père de la victime, que je juge intolérables.

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  4. Bonjour,
    La critique ne me gêne absolument pas quand elle est argumentée. Et si je conviens de ma maladresse (pour ne pas dire erreur) concernant l'emploi de certains mots, je n'enlève rien au fond de ma pensée. Quiconque aura lu cet article de façon approfondie ne peut décemment pas m'accuser de défendre le tabassage des femmes, de vouloir réhabiliter Cantat ou encore de dire qu'il a eu raison de remonter sur scène.
    J'espère que vous l'aurez compris.
    Cordialement

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